vendredi 20 décembre 2013

Suicide par pendaison ...


La nuit dernière, j'ai eu une sacrée trouille. Une trouille de chez trouille et franchement ... Je ne suis pas prête d'oublier ...

Je commence ma seconde ronde de la nuit. Pour le moment tout va bien, si ce n'est qu'une résidente déambule ...
Cette dame fortement sympatique est une ancienne infirmière qui bossait de nuit au sein d'un "asile" psychiatrique ...

Elle n'a rien d'une infirmière Ratched comme dans le magnifique film "Vol au dessus d'un nid de coucou" et c'est un bonheur de discuter avec elle autour de la psychiatrie que j'adore.
Là où le bas blesse ... C'est que son comportement nous renvoie à ma collègue et à moi un miroir de ce qu'on va peut-être devenir en vieillissant : des nanas qui ne dorment pas la nuit ...

Après avoir bu un verre d'eau en sa compagnie, je salue cette dame qui va se chercher une bouteille d'eau à la fontaine, et m'en vais continuer ma ronde ...

J'arrive dans une chambre où "théoriquement" il y a un Monsieur qui parle souvent la nuit avec sa femme ... Décédée depuis plus de 20ans ... Il lui dit à quel point il l'aime, ... C'est gênant d'entrer dans la chambre parce que parfois il lui dit des choses qui ne me regardent pas ... (la vie sexuelle des autres ne me regardant pas) ...

Chose étonnante, je n'entends pas Monsieur Papinou parler ...
D'habitude, sa chambre étant juste devant les escaliers, on l'entend parler depuis le palier ...
Me disant qu'il doit dormir, je ne frappe pas à la porte avant d'entrer pour ne pas le réveiller ...

J'ouvre doucement la porte de sa chambre et de manière à avoir un peu de lumière dans la chambre sans gêner le sommeil de Monsieur Papinou...

Et là .........................

Grosse frayeur ...

Je vois Monsieur Papinou allongé sur le dos, la tête renversée vers l'arrière et la langue légèrement pendante ... Parfois il dort la langue pendante, c'est "son truc" ... Mais là où je suis prise de stress paroxystique ... C'est que Monsieur Papinou a le cordon de son système d'alarme autour du cou ...

Là ni une ni deux, j'allume la grande lumière et j'accoure vers Monsieur Papinou. Je lui retire le cordon d'appel du cou et le réveille en posant ma main sur son torse et en la bougeant pour le faire réagir ...
Et là ... Monsieur Papinou se réveille ... Doucement, ... et me demande ce qu'il me prend à le réveiller de la sorte ...

Le stress descend et je me rends compte que la situation n'a rien de grave ... Mais je suis bonne pour expliquer la situation à Monsieur Papinou qui me prend pour une folle ...


Je suis donc officiellement baptisée la folle ...
Au final Monsieur Papinou semble comprendre ma détresse et, comme pour me rassurer me dit "je ne suis pas suicidaire. Si je me suicidais, qui resterait pour s'occuper de ma femme ?" ...

A compter de ma prochaine nuit de travail, le cordon d'alarme de Monsieur Papinou sera enroulé autour de la seule barrière de son lit à hauteur d'environ 80% de la longueur du cordon ...
Non pas que je ne fasse pas confiance à Monsieur Papinou (qui s'occuperait de sa femme décédée depuis plus de 20ans ?), mais par sécurité ...

On ne s'ennuie pas à bosser dans une EHPAD ...



mardi 10 décembre 2013

Hein ? Quoi ? Comment ? Ah bon ...

Ce soir, j'arrive en forme pour ma première d'une petite série de deux nuits ...


L'un des médecins de l'établissement est présent pour venir ausculter ses patients et renouveler si besoin leurs traitements.

  Il est en colère, mais pour le moment je ne vais pas l'embêter et je file à la cafetière lui préparer un café avec deux sucres ... C'est qu'il adore le café ce médecin. Alors quand il n'est pas en forme (il travaille trop) ou qu'il est en colère, j'ai pris l'habitude de lui apporter un café pour qu'on discute.

   Ça y est, il est plus calme ... Il faut dire que l'odeur du café a fait son effet ...

     Son soucis est qu'une de ses patientes est tombée hier. Jusque là malheureusement c'est pas inhabituel et fort heureusement sans aucune blessure pour la patiente.
   Comme j'arrive de deux semaines de vacances, je ne sais pas encore ce qu'il s'est passé durant ce temps, car je venais lire les transmissions quand j'ai vu notre médecin chouchou énervé...
    Après explications, il se trouve que je comprends mieux qu'il soit en colère ... Sa patiente ne prend plus ses traitements depuis au moins une semaine ...
   Elle commence à perdre la tête (à 103ans elle peut) et elle met ses comprimés dans sa table de nuit à chaque fois qu'on lui en donne.
    Sans vouloir faire ma râleuse, je souligne au médecin que cela fait au moins deux mois que je note dans l'ordinateur qu'il serait intéressant de s'assurer que la patiente prend bien ses traitements, car j'ai des doutes et en plus elle ne boit pas assez ... Mais comme beaucoup de fois, mon avis ne semble pas être intéressant pour certaines collègues de jour ... Certaines que j'adore s'assurent bien que cette patiente prend ses traitements avec un petit jus de pomme (celui qu'elle préfère).

    On est allés vider le tiroir de la patiente pour éviter les dangers liés à une prise simultanée de multiples gellules et/ou comprimés. Elle a un comprimé qu'elle prend trois fois par jour ... On en a trouvé 40 ... Impossible de rester de marbre et surtout impossible de trouver des circonstances atténuantes à mes collègues de jour ... J'ai beau chercher, je ne trouve pas ce qu'il pourrait éventuellement atténuer la faute des équipes soignantes diurnes ... Pourtant d'habitude je suis plutôt du genre à jouer les médiatrices (et souvent me faire avoir, mais bon ...). Mais là ...

    Dans un soucis d'éviter les conflits, le médecin et moi avons décidé que je ne serai pas témoin des comprimés trouvés dans le tiroir et que je serai l'une des destinataire du mot qu'il a écrit dans l'ordinateur ... Mot qui rappelle que notre métier c'est aussi nous assurer que les patients prennent bien leur traitement, ou signaler quand telle ou telle personne refuse de prendre tel ou tel traitement ...

   Parfois on aimerais être une autruche pour pouvoir creuser un trou et s'y cacher ... Tellement on a honte de nos collègues ... Et de dire "oui mais elles ne sont pas diplômées" ne passe plus ... Car certes les filles Font Fonction d'Aide Soignantes avec une pseudo formation qui laisse à désirer, mais mes collègues IDE sont bel et bien formées et bel et bien diplômées ...

    Parfois j'ai honte, vraiment honte de travailler là ...